Le rap a pris d’assaut les festivals de France. Chaque année il gagne de plus en plus de terrain dans les programmations de ces rendez vous estivaux. Des événements tels que Les Ardentes et Le Printemps de Bourges ont été précurseurs dans cette intégration mais cette ouverture s'est également étendue à d'autres grands événements comme le Main Square Festival, Garorock, Les Vieilles Charrues, les Francofolies, et les Eurockéennes. Mais jusqu’ou cette conquête va-t-elle allee, bientôt du rap au HellFest ? On en a eu la chance d’en discuter avec Jean Yves Reumont, programmateur des Ardentes, LE festival de rap le plus important d’Europe, qui se déroule début juillet à Liège.

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De marginal à incontournable

Initialement,  l'intégration du rap dans les festivals a suscité des réticences et des critiques de la part d'une partie du public. Nombreux considéraient le rap comme un genre inadapté aux festivals, traditionnellement dominés par le rock, la pop, et la musique électronique. Mais ce fut le cas pour tous les genres, il a fallu du temps pour que les sceptiques acceptent d'autres genres musicaux dans les festivals.

“Au début le public rock disait “ils ne font pas de la musique, il n'y a pas d'instruments, ect” Il a fallu un temps avant qu’ils n’assimilent que dans un autre chapiteau, il pouvait y avoir de la musique électronique. Maintenant t'as des festivals comme Tomorrowland, où t'as plus que des DJs, et c'est un festival hyper représentatif au niveau mondial.”

- Jean Yves Reumont, programmateur des Ardentes

On note également les problèmes techniques liés au son en live, tels que des équipements défaillants ou une acoustique inadaptée, qui peuvent impacter la qualité des prestations et la satisfaction du public. Mais cette perception a évolué avec le temps, grâce à la qualité des performances artistiques. 

“Aujourd'hui, tous les festivals qui programment du rap ont contribué à ce que les artistes de la nouvelle génération se rendent compte qu'ils devaient préparer des spectacles pour des grandes scènes. Parce que ce n’était pas dans la culture d'aller à des festivals, maintenant ça change parce que t'as un public qui vient aux Ardentes et qui commence à faire de la musique en se disant peut-être qu’un jour, je vais me produire aux Ardentes, aux vieilles Charrues, et ce jour-là, il faudra avoir un show et pas juste un showcase de boîte de nuit”

Les Ardentes pionniers sur le Rap

Parmi les festivals pionniers, Les Ardentes se distingue particulièrement. Fondé en 2006, ce festival belge était initialement axé sur l'électro-rock. Cependant, au fil des années, Les Ardentes a élargi son spectre musical pour inclure une variété de genres, notamment la pop, le rock, la musique électronique, la chanson française, et le jazz. Cette ouverture progressive a permis au rap de trouver une place de choix dans la programmation du festival, au point que Les Ardentes est désormais perçu comme "le festival rap" par excellence, à tel point qu’il est devenu l’un des principaux événements hip-hop du monde avec Rolling Loud.

“J'ai effectivement assisté à la transition du festival. Nous, on date toujours le basculement à 2015. Si tu veux, 2006 à 2014, on était un festival assez éclectique, où il y avait déjà du rap, on a d'ailleurs Lil Wayne à l'affiche en 2009, mais il a annulé. Donc, il y avait déjà du rap, mais c'était un petit peu comme c'est le cas actuellement à l'affiche de beaucoup de festivals, c'était du rap aux côtés de grosses programmations rock, électro et pop.”

Ainsi, de nombreux festivals français ont élargi leur programmation. C’est le cas du Le Main Square Festival, connu pour ses têtes d'affiche internationales. Garorock, originellement centré sur le rock alternatif, a également diversifié sa programmation pour inclure des rappeurs, attirant ainsi un public plus jeune et varié. Tout comme les Eurockéennes de Belfort, avec leur programmation audacieuse et variée, ils ont largement contribué à la reconnaissance du rap français, en offrant une scène prestigieuse à des artistes issus de ce mouvement. En intégrant le rap dans leurs programmations, ces festivals ont non seulement enrichi leur offre musicale, mais ont également joué un rôle crucial dans la légitimation et la popularisation du rap en France.

Le Rap = Bancable ? 

Souvent associé à une base de fans dévouée et passionnée, le rap représente une opportunité lucrative. Ces fans sont prêts à acheter des billets de concert, des produits dérivés et à soutenir activement les artistes qu'ils aiment. En invitant des artistes de rap à se produire, les festivals peuvent non seulement diversifier leur programmation, mais aussi augmenter leurs recettes grâce à l'engouement et à la fidélité des communautés 

“Ce qu'on a tout de suite bien aimé avec la génération Z c'est que c'était un public vraiment amoureux de musique, qui ne venait pas en festival juste pour boire des coups et discuter. C'était parfois un peu le cas avec notre ancien public. Les amateurs de rap venaient dès 13h pour le premier artiste, ils connaissaient toutes les paroles de A à Z, et ils commençaient à faire des pogos, le tout début du phénomène dans le rap. Donc, c'était vraiment un festival qui venait de l'avant. On a tout de suite eu cet effet communautaire très, très fort qui a vraiment pris corps en 2018.

Plusieurs festivals illustrent cette tendance, démontrant que le rap est devenu un moteur économique et culturel pour les événements musicaux. Le Golden Coast Festival, qui se tiendra les 13 et 14 septembre 2024 à Dijon, est entièrement dédié au rap. Cet événement promet de rassembler des grands noms du rap français et des talents émergents, créant ainsi une véritable célébration de la culture. Ou encore ke Grünt Festival, début septembre à Paris, qui se distingue par son engagement à mettre en lumière les nouveaux talents. 

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Y’en a marre de voir ton rappeur préféré partout

Lorsque les artistes rap se produisent dans des festivals, ils font face à divers défis. L'un des plus courants est la répétitivité des programmations, où les mêmes artistes sont souvent programmés sur plusieurs festivals, ce qui peut diminuer l'originalité perçue de leurs performances.

“Il ne faut pas que les artistes français se produisent trop, à un moment donné, même s'ils ont justement le vent en poupe et que ce sont eux qui ont le plus d'exposition, ils doivent faire des choix. Ils ne pourront plus se produire dans tous les festivals, c’est notamment le cas de certains artistes qui se produisent peut-être trop…On l'a noté, notamment, à Lille, ils ont dû annuler les Paradis Artificiels par manque de préventes, ils notaient d’ailleurs à juste titre que parfois les artistes se produisaient trop. L'exclusivité reste quelque chose d'important donc la multiplication des artistes dans les festivals rap et éclectique diminue peut-être leur attractivité.”

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L'évolution du rap dans les festivals est un exemple frappant de transformation culturelle. Et malgré les défis qui l'accompagnent, les festivals offrent de nombreuses opportunités aux artistes. Se produire dans de tels événements permet d'élargir leur fan base et leur notoriété, en particulier lorsqu'ils partagent la scène avec des artistes renommés. De plus, la couverture médiatique de ces événements assure une visibilité accrue, renforçant ainsi l'image de marque et l'influence des artistes dans le paysage musical. Mais attention c’est comme tout, oui la scène mais avec modération.

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✍️ Écrit par Gaspard Cazin
🎤 Interview par Lucie Bonnet
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